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lundi 26 novembre 2012

Intelligence Économique et influence : pour une approche holistique.



« Le passé tend à reconquérir son influence perdue en s'actualisant » Henri Bergson in Matière et mémoire (1896)

En plein bouleversement géostratégique international, nous constatons, plus que jamais, que l’intelligence économique de 3ème génération constitue un vecteur d’influence dans les domaines à la fois politiques, économiques, diplomatiques et transversaux. Influencer les activités les plus variées, dans un contexte mondialisé où la conquête de terrain[1] n’a plus de frontières devient un véritable enjeu. Seule la volonté fixe des limites.

Pour les acteurs publics et privés, dès lors que la planification est arrêtée, les approches stratégiques et tactiques mises en place, la finalité demeure toujours la même : comment convertir le pouvoir en influence tout en prenant en compte les actions (passives ou actives) des adversaires. Les méthodes d’influence, contre-influence ou anti-influence, émergent tous azimuts.  

Ainsi, l’influence se trouve souvent au milieu de scénarios complexes, de situations changeantes et de variables externes imprévues, obligeant les concepteurs et les acteurs  de la planification, de la stratégie ou de la tactique, à voir le théâtre opérationnel comme une totalité. Les nombreuses activités et composantes (directes ou indirectes) sont considérées comme des ensembles dont l’influence holistique se nourrit. 

Cette vision  du monde où les ensembles sont supérieurs à la somme de leurs parties, associe des aspects historiques, comparatifs, descriptifs, conceptuels, gnoséologiques et de la théorie générale des systèmes. L’objectif est de dégager une feuille de route, un plan d’action, des indicateurs, avec des marges de manœuvre plus amples.

Dans cette perspective aujourd’hui, le plus important est de disposer d’agents d’influence efficaces, porteurs d’une doctrine, d’une culture. Il n’est pas souhaitable, tant dans les secteurs public ou privés, de laisser cette mission aux mains d’acteurs déjà influencés par les cibles car ils deviennent dès lors un cheval de Troie (parfois involontairement) pour le système ou l’organisation. Sans cette fonction essentielle, les moyens et techniques sont parasités.

Sinon comment serait-il possible de suivre la définition de Talcott Parsons[2] pour qui  «l’influence  sert à convaincre autrui de l’avantage qu’il a à se rallier aux vues souhaitées (persuasion), et les engagements généralisés à démontrer à autrui que le devoir lui interdit de refuser son aide. On ne saurait parler d’influence dans les cas où l’effet produit est accidentel et involontaire : on dit qu’un acteur a de l’influence quand il oriente les opinions d’autrui dans un sens et une direction qu’il a préalablement choisis. On ne peut pas séparer, dans l’exercice de l’influence, l’effet de l’intention.»[3]. Dès lors la capacité générale à persuader est décisive car l’influence est une action qui s’exerce de façon graduelle, continue, presque insensible et coopérant avec d’autres causes dans la production de ses effets[4].

En ce qui concerne les organisations en général, deux auteurs américains préconisent une stratégie d’influence selon les principes des 3R (Rétribution, Réciprocité et Raisonnement)[5], appliqués selon des méthodes opératoires (défensifs et offensifs) bien précis tandis qu’un troisième auteur analyse le processus de l’influence[6] et les neuf tactiques[7] proposées selon trois résultats qualitativement différents des essais d’influence comme l’engagement, la satisfaction et la résistance.

Finalement, les secteurs d’influence sont nombreux et les volontés d’agir aussi, mais sans une doctrine et des agents d’influence performants, les actions seront toujours guidées par des impondérables. Il est nécessaire d’intérioriser une culture pour que chaque acteur devienne un ambassadeur d’influence.

Par ailleurs, sachant que l’influence est une activité pluridisciplinaire, transversale, où les sciences sociales et humaines en général occupent une place privilégiée, celle-ci doit être amenée de manière coordonnée, intelligible, planifiée, avec des piliers essentiels dans son mode opératoire, tels que la psychologie sociale, la politique globale, la géopolitique et l’histoire du présent.

Ainsi, avec un corpus holistique nous pourrions inverser les indicateurs de résultats, développer une doctrine française d’influence sur le territoire national et pour la diaspora dans le monde. Les partenariats public-privés, par une diplomatie d’influence et une diplomatie d’entreprise[8], doivent se développer davantage car bien que les intérêts peuvent paraître différents et éloignés, ils ont en réalité la même finalité, celle d’influencer. 

Cette mission doit aller à la conquête des esprits et des décisions, agir directement sur les terrains et être plus offensive. L’influence holistique est peut-être une nouvelle méthode d’action à explorer, et cette approche tente de lui redonner, dans un contexte où elle est trop souvent galvaudée, toutes ses lettres de noblesse.- 



[1] Physique ou virtuelle
[2] Talcott Edger Parsons, sociologue américain, 1902-1979.
[3] Revue française de sociologie, année 1964, vol 5 ; pp 387-401 François Chazel
[4] Vocabulaire Technique et Critique de la Philosophie, Ed Puf, 1996.
[5] David A Whetten and Kim S. Cameron, in Developing Management Skills, Prentice Hall, 2004
[6] Gary Yukl  in Leadership in Organizations, Prentice Halle, 1998
[7] Persuasion rationnelle, consultation, comportement amical, échanges, coalition,  légitimation, pressions, appel personnel, appel aux valeurs et idéaux. 

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